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Channel: Geneviève Lebouteux
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Alourdis, allégés… un même coeur

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Conséquence surprenante de la période d’épidémie et de confinement que nous vivons, la vie quotidienne de certains est alourdie (souvent considérablement) tandis que celle des autres est (beaucoup) allégée … Un curieux déséquilibre s’est installé chez la plupart d’entre nous mais dans deux sens opposés.

Nombreux sont ceux qui font face à un surcroit de travail, parfois dans des conditions très difficiles, comme les soignants en hôpital, les pompiers, tous ceux dont le travail à l’extérieur continue et s’alourdit (gestion des contacts, collègues malades…). Parmi ceux qui doivent désormais travailler de chez eux, les jeunes parents se retrouvent en situation difficile comme Mathilde, enseignante, mère de trois enfants, qui raconte : « Le matin, je fais la classe aux deux grands avec le petit qui a du mal à rester tranquille, l’après-midi pendant la sieste du dernier, je prépare mes cours… le soir quand les enfants sont couchés, je réponds aux messages des élèves, corrige leurs devoirs… souvent jusqu’à 2 h du matin. » Autre témoignage : Marie, médecin, mère de deux jeunes enfants, enceinte de 7 mois, dont le compagnon, malade du coronavirus, est cloué au lit depuis 15 jours : « Heureusement que le congé maternité est arrivé mais vivre tout cela dans un tout petit appartement parisien, c’est terrible... » Charge de travail accrue aussi pour tous ceux qui, comme Catherine et Patrick, s’occupent d’une personne très âgée et malade chez eux : « Les aides à domicile ne passent plus… la toilette, les soins… on fait tout tous seuls« . Dur, dur, pour toutes ces personnes surchargées qui devront tenir encore longtemps semble-t-il. Pour elles, guère de choix : faire face, mobiliser leurs forces, leur sens de l’organisation, leur moral…

Et puis, tout près de ces gens-là, se trouvent ceux qui, comme moi, vivent un quotidien considérablement allégé : les actifs au chômage technique, les indépendants qui n’ont plus de travail, les retraités dont les activités se sont arrêtées… Ceux-là ont un autre défi : faire face au vide et à l’impuissance de ne pouvoir pratiquement pas aider ceux qui sont surchargés.

Accepter… Prendre de la hauteur… C’est le symbole du Tao qui me vient, lui qui présente les contraires comme complémentaires, formant un tout harmonieux. Les alourdis et les allégés, nous formons un tout. Avoir conscience de notre unité profonde nous conduit à prendre toute notre part, là où nous sommes aujourd’hui, pour nous soutenir les uns les autres et oeuvrer ensemble à rendre fécond ce temps si spécial pour que nos organisations se transforment profondément : pas question de revenir au monde d’avant qui est à l’origine du problème et, plus globalement, de la destruction planétaire.

Certes les allégés ne peuvent pas directement aider les alourdis mais en se connectant vraiment à eux-mêmes, au monde, ils peuvent alimenter une énergie de transformation positive et bienveillante. Comme l’écrit Marianne Dubois : « Un geste, une pensée minuscule, prennent une importance démesurée et soutiennent chacun au-delà de l’apparence ».  Se soucier des proches qui peuvent se trouver isolés ou face à des difficultés financières angoissantes, être solidaires et ouverts…

Il est des alourdissements d’un autre ordre : celui des pensées et des émotions. Les médias ressassent continuellement les avancées du virus, on ne parle que de ça et nombre d’entre nous sont en proie à la peur, à la tristesse, à la méfiance… Ce n’est ni nécessaire, ni bénéfique, cela a d’ailleurs tendance à fragiliser notre immunité ! Réalisons que nous projetons sur l’extérieur ce qui en nous cherche à s’exprimer et prenons la peine d’aller le regarder en nous, l’accepter… pour évoluer. Cette démarche personnelle est un cadeau que nous faisons au monde : nous participons à alléger l’ambiance collective.

Je laisse la conclusion à Jeff Foster (extrait de Tomber amoureux de ce qui est) : « Une crise est en réalité quelque chose de sain. Cela signifie que le serpent est en train de changer de peau. Les anciennes manières, les identités stagnantes, ne conviennent plus. (…) Le changement est inévitable et l’invitation toujours présente est de se tourner vers la douleur du changement et d’inviter ce moment en soi, comme s’il avait été choisi, même si on ne peut pas croire un instant qu’il l’a été.« 


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